Bunker survivaliste

Petit article mettant ici le focus sur un reportage datant de 2018. Il s’agit de « Survivre » réalisé par Alexandre Pierrin pour FranceTV Slash/enquêtes.

Dans ce reportage coupé en 5 volets, nous rencontrons quelques figures de YouTube en matière de survivalisme. Certains sont connus de tous, d’autres moins. Nous pouvons citer, entre autres, Piero San Giorgio, Phil Gom, Bernard le Prévoyant, Alexis Bruce… Mais aussi Yoann, Freddy, Catherine et Pierre…

Ce reportage, très intéressant, permet une double lecture. Le narrateur, au travers de ses commentaire, peut se montrer condescendant, voir acerbe à l’encontre de la philosophie survivaliste. Et ce malgré l’intervention des personnes interviewées. Pour la plupart, ces acteurs du milieu se montrent clairvoyants et modérés.

Mais le narrateur se présente comme étant « la petite voix dans notre tête » et conclue : « et si les survivalistes avaient raison » ? Nous ne savons pas ici quoi en penser. Le narrateur a-t-il pris le parti de souligner les idées préconçues dans l’esprit de bon nombre afin de semer un doute. Peut-être cherche-t-il même, sans le montrer clairement, à créer le germe d’une remise en question ? Ou tout simplement cherche-t-il, de manière un peu bancale, à décrédibiliser le mouvement ? Le but de ce reportage est flou. Et cela semble être fait exprès.

Petit résumé de chacun des volets de « Survivre » comportant quelques citations de la « petite voix », pouvant nous faire grincer des dents.

Bunker survivaliste
Descente dans un bunker survivaliste pour survivre – Martin Bock Ilagam /Pixabay

Pourquoi devient-on survivaliste ? – Survivre #1

Le documentaire présente en premier lieu Bernard le prévoyant, que l’on a retrouvé dans divers reportages TV ou sur la chaine de Steven « Citoyen Prévoyant ». Il nous parle de sa philosophie et de sa crainte que notre monde passe bientôt en mode dégradé.

Puis vient le tour de Yohan, cadre survivaliste dans la banlieue parisienne ayant développé une BAD semi-urbaine. Dans sa petite Base Autonome Durable, il développe un petit jardin, un mini-poulailler, un potager en aquaponie… Il dispose de panneaux solaires, d’un poste CB…

Catherine et Pierre, quant à eux, ont développé un petit bunker et se protègent des éventuels risques NRBC. Catherine nous explique leurs craintes vis-à-vis de l’avenir pouvant être synonyme de troisième guerre mondiale. Lorsque l’on observe en effet les prémisses d’un conflits, nous remarquons toujours plusieurs similitudes. Nous pensons à la montée du nationalisme, une crise économique, une remilitarisation du pays… Nous sommes en plein dedans.

Florilège des interventions de la « petite voix » :

« Aller égoïstement plus profond en attendant que le monde règle ses problèmes, vivre dans l’anonymat et dans la peur ».

« Disparaitre pour être mieux protégé. Tant pis pour les autres, tant pis pour toi. Ils veulent juste sauver leur peau, se reconstruire, se retrouver… seuls ».

Survivre #2 – Et si le survivalisme était une thérapie ?

Second volet de « Survivre ». Dans ce reportage, nous avons le plaisir de rencontrer Alexis Brus à ses débuts. Il nous témoigne de sa passion pour la forêt, le buschcraft et le survivalisme. Cet environnement naturel l’a aidé à se ressourcer, à grandir, à gagner une certaine confiance en lui-même. Aujourd’hui, sa chaine YouTube a bien grandi et affiche plusieurs dizaines de milliers d’abonnés. Dans ce reportage, nous le voyons évoluer dans la verte, récolter de la sève de bouleau, préparer de l’ortie pour en faire des beignets.

Intervention de la petite voix :

« Retrouver la nature ou retrouver sa nature. Difficile à dire s’il cherche à se recentrer ou à nous échapper. Et si, pour certains survivalistes, la catastrophe n’était qu’un prétexte et la préparation, une thérapie ? »

Freddy, 40 ans, explique que pour lui, le survivalisme est une philosophie qu’il a adopté après un burn-out. Vivre plus simplement et faire son jardin lui a permis de regoûter à la vraie vie. Il ne cherche plus à vivre sa vie comme on gèrerait une entreprise, car il prend en compte les éléments non chiffrables : sa personnalité, son cœur, ce qu’il aime et le fait vibrer. Il vit dans une forteresse du XIXème siècle, entouré d’un terrain d’une vingtaine d’hectares.

Est également présent dans ce reportage le survivaliste Philippe de la chaîne Phil Gom. Il a basculé dans le survivalisme en 2011 après une perte de client. Il a connu une période de disette et il s’est dit : « plus jamais ça ». Phil Gom ne croit pas à la fin du monde mais à la fin de son monde. La réserve alimentaire constitue pour lui une assurance vie.

Intervention de la petite voix :

« Chaque jour, essayer de prévoir l’imprévisible en attendant que l’exceptionnel devienne la norme. Se préparer à tout, partout, tout le temps, quitte à vivre sa vie à l’ombre d’un désastre ».

Le survivalisme est-il une mode ? – Survivre #3

Ce troisième volet du reportage Survivre s’ouvre avec Alexis Brus réalisant des vidéos test avec du matériel prêté ou donné par quelques marques spécialisées. Un focus est placé ici sur la tendance des survivalistes influenceurs. A ce propos, nous effectuons un passage par le salon du survivalisme (le premier de 2018) en compagnie d’Alexis rencontrant des sponsors, des partenaires, des instructeurs de survie et d’autres Youtubeurs.

Interventions de la petite voix :

« Je suis cette petite voix qui s’étonne de voir un survivaliste adepte du « pour vivre heureux, vivons caché » s’exposant sur les réseaux sociaux comme n’importe quel influenceur à la mode. »

« En devenant un marché, le survivalisme se transforme en produit et la peur en argument commercial (…) la survie devient un loisir comme un autre. »

Nous retrouvons de nouveau Bernard le Prévoyant. Celui-ci se montre enthousiaste par rapport au premier salon du survivalisme permettant de révéler au grand jour que les survivalistes ne sont pas tous des cinglés habillés en camouflage. Plutôt des débrouillards, des jardiniers, des gens prosaïques et pragmatiques souhaitant assurer une certaine autonomie.

Description du salon du survivalisme par la « petite voix » :

« Le supermarché de la catastrophe ».

Nous assistons ensuite à l’ouverture d’une conférence de Piero San Giorgio. Le reportage se poursuit par une mini-interview de l’auteur de « Survivre à l’effondrement économique » (et bien d’autres ouvrages). La caméra part également à la rencontre des fans de Piero durant cette séquence. Piéro nous explique son approche de « la responsabilité », ni catastrophiste, ni alarmiste.

Intervention de la petite voix :

« Devant une foule conquise, l’idéologue le plus en vue dans le monde du survivalisme assure le spectacle. On l’écoute attentivement lorsqu’il annonce un effondrement global pour l’année prochaine. On frissonne quand il énumère toutes les menaces qui nous guettent. Un marchand pas comme les autres venu au salon pour vendre son fonds de commerce. »

Piero précise devant caméra qu’il se fout de ce que pensent les médias et que d’ailleurs, ils ne sont pas là pour penser. Il précise qu’il est invité par tout type d’événements, ainsi que par les partis de gauche, de droite. Piero estime que malgré tout, sa parole sur l’autonomie ne change pas, mais qu’elle raisonne tout de même mieux chez certains que d’autres.

Intervention à charge du narrateur :

« Il dit peut-être toujours la même chose, mais sa parole raisonne tout de même mieux chez ceux qui font commerce de la peur depuis toujours. Notamment chez les membres de l’ultra-droite européenne qu’il invite sur sa chaine YouTube et dont il préface les livres ».

Peut-on être survivaliste et non-violent ? – Survivre #4

Le quatrième volet de ce reportage s’ouvre sur Bernard le prévoyant. Celui-ci entretient une arme. Plus précisément un fusil Mosin Nagant 91-30. Un fusil de précision russe pour le tir à longue distance (TLD). Une arme pour ramener du gibier (ou pour l’autodéfense). Il témoigne avoir commencé par un sac d’évacuation, un potager, des stocks de nourriture et des stocks médicaux… Puis il a axé en dernier lieu sa préparation sur les armes.

Intervention de la petite voix :

« Je suis cette petite voix qui se demande quelle chasse se pratique avec un fusil de précision à 2000 m de distance, quel gibier se traque avec un fusil à pompe et s’il existe une différence entre une arme qui sert à chasser et une arme qui sert à tuer. »

Bernard le prévoyant présente également un gilet pare-balle de bonne qualité ainsi qu’un casque pare-balle. Le but étant de se protéger au cas où dans un monde instable. Bernard le prévoyant s’est équipé dès aujourd’hui avant qu’une crise ne survienne et que ces articles ne soient plus disponibles.

Intervention de la petite voix :

« Face à des crises virtuelles, les survivalistes se créent une urgence réelle. Il faut s’équiper mieux que tout le monde, avant tout le monde, sans éveiller les soupçons. »

Bernard déplore le regard de tout un chacun sur les armes à feu, ainsi que les amalgames. Parmi les clichés qui l’irritent, Bernard cite  le fait que les gens croient que les survivalistes attendent la fin du monde.

Retour ensuite sur Alexis Brus pensant que la plupart des gens ayant des armes sont des personnes qui ne savent pas se défendre. Car une arme peut se retourner contre nous si on ne sait pas s’en servir. C’est pourquoi il s’est également mis au karaté. Alexis Brus ne possède pas d’armes à feu, car en France, il n’y a pas de port d’armes. La meilleure arme immédiatement disponible au cas où sera donc lui-même… Il pratique également la défense passive avec des objets du quotidien pouvant servir à l’auto-défense.

Intervention de la petite voix :

« Avec ou sans armes à feu, il faudrait se préparer à se défendre à chaque fois que l’on sort. Car dehors, la menace est partout, invisible et permanente. »

Freddy, dans son fort, déplore ce pilier survivaliste relatif à la défense soi si prépondérant chez les preppers. Le cas échéant, pour se défendre, il utiliserait les ressources de son fort et de sa position dominante. Il maitrise également chaque centimètre carré de ses 20 hectares de terrain. Un atout pour la défense ! Notons que sa forteresse représente à elle seule 1,4 hectares recouverts par de la pierre. Un bâtiment pouvant autrefois abriter 800 soldats !

Freddy raconte que le maire du village lui a un jour communiqué une étrange demande. « s’il arrivait un problème, accueillerait-il les habitants du village ? ». Freddy a répondu par l’affirmative.

Intervention de la petite voix :

« Il se pourrait donc que l’on soit survivaliste et ouvrir sa porte à un inconnu le jour de la catastrophe. Se préparer seul et survivre à plusieurs. Il ne reste plus qu’a savoir ce qui, le moment venu, différenciera un ami d’un ennemi. »

Quel est le projet politique des survivalistes ? – Survivre #5

Dans ce 5ème et dernier volet de « Survivre », nous retrouvons Yoann dans sa BAD semi-urbaine. Ce dernier installe une antenne CB dans le but de participer au réseau cibiste survivaliste. Le but : créer un moyen de communication autonome afin de s’échanger des informations et de s’entraider.

Une bonne introduction pour aborder le sujet de la constitution d’un clan survivaliste. On parle ainsi de famille ou de clan choisi, comme la constitution d’un quartier autonome, de micro-sociétés, de tribus post-modernes regroupant un maximum de compétences.

C’est aussi la pensée de Philippe (Phil Gom). Selon lui, un survivaliste seul ne peut pas s’en sortir. L’union fait la force, pour la protection du clan, les échanges, la formation. Dans notre société moderne, nous avons perdu nombre de compétences : cultiver, pêcher, chasser, élever des bêtes… Tout cela, il nous faudra le réapprendre, si possible en ayant dans les clans des « experts » dans plusieurs domaines.

Intervention de la petite voix :

« Quand l’avenir est effrayant, le passé devient un refuge. L’antithèse parfaite du désastre qui nous attend. Il suffirait de défaire ce que la modernité a dénaturé pour revenir à une période idéale que chacun est libre d’inventer. Quitte à recréer un passé complétement fantasmé. »

Nous retrouvons Alexis Brus, évoquant également son aspiration à vivre comme dans le passé. Il recrée notamment avec son entourage un réseau de personnes vivant en autonomie sur leur terrain. Nous assistons, en compagnie d’Alexis Brus et l’un de ses copains, au début d’une session de buschcraft et de reconstitution de combat médiéval.

Puis retour sur la vie de Bernard le prévoyant qui nous dessine sa futur BAD. Le choix du site idéal est déjà fait : un promontoire permettant de voir arriver tout danger de loin. Le tout dans un petit village avec une source, de la terre pour cultiver, du bois pour se chauffer.

Intervention de la petite voix :

« Un homme seul, rivé anxieusement sur son rocher par sa foi inébranlable qu’une tempête arrive. Est-ce que ce ne serait pas ça, la parabole du survivalisme ? »

Conclusion

Le reportage termine par ces commentaires de la « petite voix » semblant (à dessein j’imagine), souffler le chaud et le froid.

« Je suis cette petite voix qui a compris que les survivalistes ne croient pas en l’apocalypse mais qu’ils se préparent à l’effondrement de notre monde. Je suis ce doute tenace qui se demande s’ils ne sont pas en train de construire de leur propres mains le futur hostile et sinistre qu’ils craignent tant. Je suis cette certitude qu’il nous faut affronter collectivement les peurs de notre époque si on ne veut pas que le monde des survivalistes devienne le nôtre ».

« Et je resterai malgré tout cette envie d’espérer qui cherchera toujours une promesse d’avenir à opposer à leur projet de grand renfermement ».

« Je suis cette petite voix qui est arrivée au bout de son voyage mais qui continuera à tourner dans ta tête en se demandant malgré tout : et s’ils avaient raison ? »

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